A l’avant-dernier chapitre, c’était elle, mais en mieux. Là, surenchère, elle en fait plus encore : elle est mille, démultipliée. Dans tous ses états, par tout ce qu’elle est. Comme un état des lieux avant déménagement, emménagement. Le titre idéal pour se présenter à son entrée en scène…

Changement de personnel pour ce septième opus. Séparation artistique avec le compositeur et arrangeur Jean-Jacques Nyssen (qui signe néanmoins deux titres). C’était aussi son compagnon et c’est séparation tout court. « Je ne te dirai pas la peur / D’une vie loin de tes bras / Le poignard plongé dans l’cœur / Et la lame qui n’se r’tire pas. » L’album parle de ça. Et Clarika, esseulée, de chercher De quoi faire battre [s]on cœur.

1507-1Le temps est chagrin, ça oscille entre hier et demain, l’hiver qui se rêve en printemps, cette lumière qu’elle cherche dans le clair-obscur, ce présent où tout se joue, l’heure des choix, où le cœur s’emballe, où il ne faut pas que les mains tremblent. « Il s’en est fallu de peu / Pour que l’équation parfaite / Tapisse à jamais de bleu / Tous les recoins de leur tête… »

Il n’y a rien en cet album qui ne parle d’amour. Par des titres qui se savent rien de la chronologie, qui trouvent les plaisirs et souffrance à l’imparfait comme au futur, qui charrient une difficile mais pénétrante mélancolie.

On ne cherche plus depuis longtemps ce qui diffère d’un album l’autre chez Clarika, en quoi le nouveau disque est préférable au précédent. Nous sommes avec elle très haut dans l’art de la chanson. Ce qui diffère ici, c’est cette thématique, cette fois-ci très personnelle, de la rupture. Nous savions beaucoup de choses d’elle, mais pas de façon si intime. Même son désir, jadis, d’être porte-savon dans le vestiaire des garçons ne la mettait pas autant à nu. Paradoxalement avec une rare pudeur : Je ne te dirai pas confie-t-elle à son amour parti : « Parce que j’ai eu tant d’amour que, si ça s’arrête aujourd’hui, moi j’en aurai pour le reste de ma vie. » Amour viscéral, douloureux, inspirant, largement de quoi nourrir son répertoire de plages superbes, comme l’est cet album, impeccable, réalisé cette fois-ci par Fred Pallem, où officient aussi, chacun pour un titre, La Maison Tellier et Alexis HK, en probants soupirants.

 

par Michel Kemper