Son septième album, empreint de la rupture avec son compagnon et pygmalion depuis 25 ans, N’en est pas moins enflammé et inspiré. A bordeaux le 7 avril.

La peine en creux. La séparation en ombre portée. La douleur en moteur. On la savait ironique et piquante, fleur de peau abrasive, tendre et modeste observatrice pop d’un monde incompréhensible. Sur ce (déjà) septième album, la voilà en femme blessée par la rupture. Elle y trouve une source d’inspiration nouvelle, et, avec  » De quoi faire battre mon cœur « , touche une vérité et une dimension nouvelles.

On l’avait découverte au milieu des années 1990, notamment via sa magnifique  » Ça s’peut pas « , chanson d’amour aussi solaire que douloureusement lucide.  » Vingt-cinq ans de vie et de création communes se sont arrêtés : c’est bien sûr un bouleversement « , explique Clarika au sujet de Jean-Jacques Nyssen, compositeur et réalisateur de tous ses disques, jusque-là.  » C’est une mise en danger à tous les étages, quelque chose de vertigineux, d’où l’urgence d’écrire, de chanter.  »

Clarika n’a pas de chansons qui attendent dans le fond de ses tiroirs.  » La vie est mon stimulus direct « , dit-elle. Pas très étonnant donc qu’au fil de ces 13 chansons se dessine le portrait de l’absence. Clarika est cependant trop fine et pertinente pour verser dans les plaintes et les trop déliés. Son écriture n’a jamais été aussi précise pour dire la fin d’un temps, ses regrets mais aussi ses richesses.

Cordes baroques.

Deux vieux amoureux qui se donnent la mort, enlacés dans un palace ( » Le Lutetia »), l’infime qu’il a manqué pour que l’histoire d’amour soit éternelle ( » Il s’en est fallu de peu « ), la vraie-fausse pudeur sur la douleur du départ ( » Je ne te dirai pas « ,  » La Vie sans toi « ) : dignes et touchants. L’auteur a été chercher Fred Pallem pour prendre la place délicate de réalisateur de l’album.  » J’avais déjà pensé à lui. Je le connaissais au sein de son collectif jazz du Sacre du Tympan, renseigne Clarika. Il a su habiller la sensibilité des textes, comme Jean-Jacques.  »

Ce dernier signe quand même deux musiques. Deuxième homme clé : Raoul Tellier, de l’épatante Maison du même nom. Les deux ont composé la plupart des musiques. Une production riche de cordes baroques inédites venues de l’Est, le passage classe d’Alexis HK pour un duo ( » Dire qu’à cette heure « ), un titre de Mathieu Boogaerts ( » Le Bout de chemin « ). De quoi faire battre le cœur de pas mal d’auditeurs.  » Des photos de ma vie « , résume Clarika, qui promène son blues baroque en trio sur les routes.

Yannick Delneste